Pourquoi BlackRock a-t-il autant d’influence sur le marché crypto ?

Pour Résumer

BlackRock possède une puissance financière inégalée qui influence directement les dynamiques du marché crypto.
L’arrivée de ses ETF a changé la perception de Bitcoin, désormais vu comme un actif patrimonial légitime.
Cette institutionnalisation pourrait renforcer l’accessibilité au prix d’une perte de souveraineté pour les utilisateurs.

Un mastodonte financier

Pour comprendre l’impact de BlackRock sur les cryptos, il faut d’abord prendre conscience de sa taille : plus de 10 000 milliards de dollars d’actifs sous gestion. À titre de comparaison, c’est plus que le PIB combiné de l’Allemagne et du Japon. BlackRock gère donc littéralement une part significative de l’économie mondiale.

Ce poids donne donc à la société une capacité d’action assez inégalée. Et dans un marché crypto historiquement dominé par les gros acteurs tech, ou des gros fonds d’investissement, l’entrée d’un tel colosse ne peut que changer totalement la donne.

Ajoutons à cela la réputation de prudence quasi bureaucratique de BlackRock qui ne laisse rien au hasard. Si ce géant a commencé à regarder sérieusement Bitcoin, c’est que ses équipes ont d’abord largement évalué les risques, mesuré les opportunités et identifié un véritable potentiel de rendement dans l’acheminement des ETF liés à Bitcoin.

Un vrai gain de légitimité pour la crypto ?

2023 a marqué un vrai tournant dans l’histoire du marché crypto. C’est cette année-là que BlackRock a déposé une demande auprès de la SEC pour lancer un ETF Bitcoin spot, ce que beaucoup considéraient encore comme une chimère à l’époque. Et tout à coup, le narratif sur Bitcoin a complètement changé.

Ce n’était plus seulement l’affaire de passionnés, de libertaires, ou de spéculateurs, Bitcoin est devenu un actif potentiellement éligible à la gestion patrimoniale plutôt classique et terre à terre. Ce mouvement a naturellement ouvert la voie à d’autres géants de la gestion d’actifs, tels que Fidelity, Invesco ou encore Valkyrie, qui ont à leur tour déposé des demandes d’ETF Bitcoin spot.

Face à cette pression croissante sur le terrain réglementaire, la SEC a dû revenir sur sa position assez stricte. Entre la multiplication des dossiers, la mobilisation de l’opinion publique et un lobbying institutionnel quasi soutenu, l’autorité de régulation n’a pas pu maintenir sa posture initialement hostile à ce type de produit.

Et d’ailleurs en réalité, BlackRock ne se contente pas d’investir dans le Bitcoin : l’entreprise façonne les produits qui en permettent l’accès et installe ainsi, une passerelle durable entre la finance traditionnelle et l’écosystème crypto.

Mais qui dit passerelle dit aussi filtrage, standardisation, voire centralisation… Grâce à ces produits, des fonds de pension, des banques privées et des assureurs peuvent maintenant allouer des portions de leur portefeuille à la crypto sans jamais toucher une blockchain ni gérer une clé privée.

Cela rend Bitcoin plus accessible certes, mais aussi moins radicalement décentralisé dans la pratique. Le paradoxe est là : plus la crypto devient mainstream, plus elle est digérée par les outils de la finance traditionnelle qu’elle prétendait à la base concurrencer. On y revient juste après.

L’institutionnalisation du Bitcoin : Un vrai problème ?

L’entrée de BlackRock dans l’univers du Bitcoin n’est donc pas qu’un simple feu vert pour les investisseurs institutionnels : c’est une vraie bascule symbolique. Cela signifie que la finance traditionnelle ne voit plus Bitcoin comme une lubie anarchiste ou une curiosité marginale, mais comme un actif légitime, potentiellement incontournable d’ici quelques années.

Pour certains, c’est une validation tant attendue et l’espoir de bull runs plus explosifs les uns que les autres. Pour d’autres par contre, c’est le début de la normalisation, voire de l’absorption d’un espace né pour échapper à la base, aux circuits bancaires classiques.

Mais un problème persiste, une impression de « recentralisation» massive qui ne laisse pas indifférent. En effet, les bitcoins détenus via ces produits ne sont pas contrôlés directement par les investisseurs, mais par des intermédiaires comme BlackRock et Coinbase. Cela affaiblit donc l’un des piliers fondateurs de la crypto : la souveraineté individuelle. Blackrock instaure maintenant un écosystème plus surveillé, plus conforme, plus accessible mais aussi désormais plus dépendant du bon vouloir des géants financiers.

BlackRock et consorts pourraient progressivement redéfinir ce qu’est un « bon usage » du Bitcoin, en marginalisant les cypherpunks ou la décentralisation totale. À terme donc, le Bitcoin ne serait donc plus perçu comme une monnaie révolutionnaire, mais comme un simple actif de portefeuille parmi d’autres, l’or 2.0 oui, mais surtout l’or privé d’un unique immense acteur, BlackRock.