La Maison Blanche le martèle : la grâce accordée à Changpeng « CZ » Zhao n’a rien d’un caprice. Elle aurait suivi un chemin balisé, passé par le Département de la Justice et le bureau du conseiller juridique, avant d’atterrir sur le bureau présidentiel.
Un geste sous haute procédure
Le récit officiel s’arc-boute sur un mot d’ordre : sérieux. La grâce, dit l’exécutif, a subi la même friction que les autres, celle des mémos, des avis, des scénarios de risques.
L’argument vaut ce qu’il vaut, mais il met au moins le débat sur le terrain institutionnel. Le contre-récit, lui, a prospéré sur une séquence télévisée où le président affirme ne pas connaître l’homme qu’il a gracié.
La porte-parole traduit l’intention : absence de relation personnelle. En clair, pas d’interférence amicale, pas de passe-droit revendiqué.
Deeply grateful for today’s pardon and to President Trump for upholding America’s commitment to fairness, innovation, and justice.
🙏🙏🙏🙏Will do everything we can to help make America the Capital of Crypto and advance web3 worldwide.
(Still in flight, more posts to come.)…
— CZ 🔶 BNB (@cz_binance) October 23, 2025
Au même moment, CZ remercie publiquement et promet de « faire de l’Amérique la capitale de la crypto ». Ce type de message recolle la dimension symbolique.
Une grâce, ce n’est pas qu’un document scellé. C’est aussi un marqueur de cap, visible, qui repositionne un pays sur une carte mentale que regardent investisseurs, fondateurs, développeurs.
Le soupçon de conflit, les faits et l’angle mort
L’ombre portée, c’est l’odeur de conflit d’intérêts. Les rumeurs d’un écosystème proche du pouvoir, d’un stablecoin maison, d’investissements qui se superposent aux décisions.
L’exécutif nie, répète qu’il n’y a pas de liens personnels ni d’échanges financiers qui entacheraient la décision. Juridiquement, le pouvoir de grâce est large. Politiquement, il ne vit jamais seul.
On peut rappeler que CZ avait plaidé coupable pour défaillance de programme AML, qu’il a purgé quatre mois de prison et payé 50 millions$, pendant que son entreprise s’acquittait de 4,3 milliards$ d’amende. On peut ajouter que la grâce ne réécrit pas l’histoire de ces sanctions.
Elle ferme un chapitre pénal, elle n’efface ni le coût ni la surveillance qui s’ensuit. Le vrai nœud est ailleurs.
Est-ce un blanc-seing moral ou un désarmement d’un climat de suspicion qui paralysait la place américaine ?
Le signal envoyé au marché crypto
Le message est lisible, presque brutal dans sa simplicité : la « guerre à la crypto » est finie. À tort ou à raison, c’est ainsi que les acteurs entendent la musique.
Les juristes parleront de séparation des pouvoirs. Les opérateurs parleront d’appétit pour le risque réglementaire.
Rien n’oblige à croire que tout deviendra simple du jour au lendemain. Mais une Maison Blanche qui s’expose à défendre le fond et la forme d’une grâce aussi inflammable envoie autre chose qu’un clin d’œil.
C’est un cadrage politique qui pèsera dans les arbitrages de présence onshore, dans les dossiers ETF à venir, dans le timing des listings et des relocalisations de liquidité.
NEW: President Trump has pardoned Binance co-founder Changpeng Zhao, White House press secretary Karoline Leavitt confirmed to ABC News.
Zhao pleaded guilty in 2023 to a money laundering charge. https://t.co/XQdzsJLBVp
— World News Tonight (@ABCWorldNews) October 23, 2025
Dans l’immédiat, la réaction du marché reste prudente. Les whales historiques allègent encore au-dessus de seuils ronds, les flux ETF varient au gré des annonces, et la profondeur sur les carnets spot n’a rien d’un tapis magique.
Mais on sent déjà la différence de ton côté institutions. Quand l’exécutif revendique une vision pro-innovation, les comités risquent moins l’argument du « climat hostile » pour repousser des mandats.
C’est souvent là que se joue la prochaine jambe d’adoption, pas sur un mème mais dans des notes internes où le mot « cadrage » compte plus que le dernier chandelier.
Ce qui reste à prouver
Si l’ambition est de faire des États-Unis la place de référence, il faudra du texte, pas seulement des postures.
La crédibilité se reconstruit quand on assume cet héritage tout en montrant le chemin pour faire mieux.
La Maison Blanche a choisi son angle : sérieux procédural, absence de lien personnel, volonté affichée de refermer une parenthèse punitive. Le camp d’en face continuera de pointer le risque d’un mélange des genres.
Entre ces lignes, l’écosystème doit décider s’il y voit un feu vert ou un simple clignotant. Le droit de grâce peut changer la trajectoire d’un individu.
Le climat d’investissement, lui, se gagne sur la durée. Si les prochains mois confirment une ligne cohérente, la grâce de CZ apparaîtra comme le prologue d’une normalisation.
Si la musique redevient dissonante, elle restera un épisode spectaculaire, mais isolé. Dans un marché qui lit tout en temps réel, ce sont les détails qui finissent par trancher.
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