Les trésoreries crypto accusées d’amplifier la chute du marché

Updated 3 heures ago by · 4 mins read

On a longtemps présenté les digital asset treasuries comme des amortisseurs : elles achètent, elles gardent, elles rassurent. Sauf qu’une partie d’entre elles n’a jamais été pensée pour tenir un cycle complet.

Quand la trésorerie devient un risque

Beaucoup ont levé vite, parfois via SPAC ou PIPE, avec des obligations convertibles à l’horizon et des promesses de « rendement » à honorer. Lorsque le marché se retourne, la même poche de réserve devient un stock à écouler, méthodiquement.

La thèse n’est pas anecdotique. Un professeur de Columbia, Omid Malekan, a résumé le phénomène en rappelant que ces entités ont servi d’« événement d’extraction et de sortie » à grande échelle, libérant des jetons supposés verrouillés et ajoutant une offer qui n’était pas pricée.

L’effet psychologique est immédiat. Les desks qui voyaient dans ces bilans un filet de sécurité découvrent qu’il peut se transformer en trappe.

Les nouvelles émissions libérées, les vestings d’équipes et les ventes OTC qui finissent sur les carnets créent des marches d’escalier à la baisse. Par ailleurs, et quand les prix cassent des supports, les collatéraux se dégradent, les covenants se réveillent, les appels de marge s’enchaînent.

On ne parle plus seulement de spéculateurs sur-leviérisés, mais d’acteurs institutionnels contraints par leurs propres passifs.

Le mécanisme de la spirale

Dans un marché porté par la liquidité, la micro-structure compte. Un fonds de trésorerie qui a promis X% de rendement annuel sur des positions stakées se retrouve soudain avec des flux sortants, du collatéral moins riche et des verrous qui sautent sur des allocations « écosystème ».

Il cède des poches où la profondeur est mince. En conséquence, les teneurs de marché, eux, réduisent le risque, élargissent les spreads, ce qui rend chaque ordre de vente plus impactant.

Dans ce contexte, il faut scruter le calendrier des maturités de dettes des sociétés listées qui ont empilé du BTC ou d’autres tokens. Tant que leurs actions restent au-dessus des prix de conversion, elles roulent.

Si le titre faiblit, la tentation de vendre une tranche d’actifs numériques pour respirer augmente. D’ailleurs, l’histoire récente a déjà montré que même les acteurs perçus comme « inébranlables » ajustent leur cadence d’achat quand le marché devient hostile.

Est-ce grave ? Pas forcément, mais cela retire un pilier de la demande à court terme, et le marché le ressent.

L’afflux corporate, bénédiction ou bombe à retardement

Paradoxalement, l’adoption institutionnelle n’a jamais été aussi visible. Rien qu’en octobre, 48 nouvelles sociétés ont ajouté du Bitcoin à leur bilan, portant l’ensemble à 207 entités et à plus d’un million de BTC en réserve, pour plus de 101 Mds$.

Côté Ether, environ 70 entreprises détiennent désormais près de 6,14 millions d’ETH, soit plus de 20 Mds$ en valeur.

D’un point de vue structurel, c’est une courbe en cloche : à l’aller, l’appétit corporate aspire l’offre, assèche les carnets et tire les prix.

Au retour, si les conditions de financement se tendent ou si les promesses de rendement pèsent trop, la même base d’acheteurs se met à devenir vendeuse, parfois en dehors du marché, parfois en cascade.

La question est simple : les nouveaux détenteurs auront-ils la patience et la gouvernance pour tenir quand la volatilité morde vraiment ?

Qu’observer maintenant, très concrètement

Si les achats récurrents reprennent de la vigueur, ils absorbent l’excès d’offre et recréent une base. S’ils ralentissent tandis que des conversions de dette approchent, la pression s’accumule.

Au fond, il ne s’agit pas de désigner un bouc émissaire, mais de reconnaître une réalité de cycle. Ensuite, les trésoreries crypto ont apporté de la légitimité et du capital, elles apportent aussi de la cyclicité et, parfois, du sur-levier déguisé.

Le marché n’aime pas les surprises. Il déteste encore plus apprendre après coup que les vendeurs n’étaient pas des mains faibles, mais des trésoriers pressés par des échéances.

La bonne nouvelle ? Les pratiques évoluent, sous la pression des investisseurs et des régulateurs. Et si la prochaine jambe de la tendance haussière doit tenir, elle se construira aussi sur cette transparence retrouvée.


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