Pékin a demandé à plusieurs courtiers chinois de geler leurs projets de tokenisation d’actifs à Hong Kong, selon Reuters. Alors que la Chine continentale freine pour protéger la stabilité financière, Hong Kong accélère ses efforts pour attirer entreprises et investisseurs dans les actifs numériques. Ce contraste met en lumière la stratégie à double vitesse entre prudence réglementaire et volonté d’innovation.
Pékin met la pression sur la tokenisation d’actifs à Hong Kong
Pékin a demandé à plusieurs courtiers chinois de mettre en pause leurs projets de tokenisation d’actifs réels (RWA) à Hong Kong.
JUST IN: 🇨🇳 China’s securities regulator instructs leading Chinese firms to pause their real-world asset (RWA) businesses. pic.twitter.com/nMxmfD9vu8
— Whale Insider (@WhaleInsider) September 22, 2025
L’information, révélée le 22 septembre par Reuters, reflète les inquiétudes du régulateur chinois face à l’enthousiasme qui entoure ce marché émergent.
Un signal discret, mais ferme
Selon deux sources proches du dossier, au moins deux grandes maisons de courtage ont reçu ces dernières semaines des consignes informelles de la China Securities Regulatory Commission (CSRC). Objectif : éviter que la ruée vers les RWAs ne se transforme en course incontrôlée.
La tokenisation consiste à transformer des actifs traditionnels, actions, obligations ou même immobilier, en jetons numériques échangeables sur la blockchain. Le secteur pèse aujourd’hui environ 29 milliards de dollars. Mais certains prédisent qu’il pourrait dépasser 2 000 milliards d’ici à 2030.
Autrement dit, Pékin ne veut pas voir ses courtiers se lancer tête baissée dans un domaine encore jeune, sans garde-fous suffisants.
Hong Kong accélère malgré tout
Ce rappel à l’ordre tranche avec la dynamique observée du côté de Hong Kong. Depuis un an, la ville multiplie les initiatives pour devenir un centre régional des actifs numériques.
Elle a mis en place un régime pour encadrer les stablecoins et ouvert la porte à la gestion d’actifs virtuels et au trading crypto.
Plusieurs courtiers chinois avaient déjà pris les devants. GF Securities, par exemple, a lancé en juin les « GF tokens », adossés à plusieurs devises. Un mois plus tard, China Merchants Bank International a participé à l’émission d’une obligation numérique de 500 millions de yuans.
Même des promoteurs immobiliers comme Seazen Group ont affiché leurs ambitions en créant un institut dédié à la tokenisation à Hong Kong.
Pékin freine, Hong Kong pousse
En Chine continentale, la ligne reste claire : prudence maximale. Pékin a interdit le minage et le trading de cryptomonnaies en 2021 et ne souhaite pas voir la finance numérique perturber la stabilité du système.
En août, les autorités avaient déjà demandé à certains courtiers de cesser de publier des recherches vantant les stablecoins.
Hong Kong, en revanche, poursuit sa stratégie d’ouverture. Le Hong Kong Monetary Authority (HKMA) et le Financial Services and the Treasury Bureau (FSTB) examinent même un cadre légal pour la tokenisation, en s’appuyant sur les expériences internationales.
Les marchés réagissent avec euphorie
Si Pékin appelle à la retenue, les marchés, eux, voient les choses autrement. Ces derniers mois, plusieurs annonces liées aux actifs numériques à Hong Kong ont déclenché de véritables envolées boursières.
Les actions de Guotai Junan International ont bondi de plus de 400 % après l’obtention d’une licence crypto en juin. Celles de Fosun International ont pris 28 % en août, quand son patron Guo Guangchang a rencontré des responsables hongkongais pour évoquer les stablecoins.
Ces réactions illustrent une réalité : les investisseurs considèrent la tokenisation comme un relais de croissance majeur, même si le cadre réglementaire reste incertain.
Un équilibre encore fragile
L’affaire montre une nouvelle fois la dualité chinoise. D’un côté, Pékin verrouille le marché intérieur et temporise. De l’autre, Hong Kong avance à marche rapide pour se poser en hub crypto mondial.
Reste à voir comment ces deux approches pourront coexister. Trop de frein côté chinois, et Hong Kong pourrait voir son élan coupé net. Trop de liberté, et Pékin pourrait craindre une bulle incontrôlable. Entre prudence et innovation, le curseur est encore loin d’être fixé.
Source : Reuters.com
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