Si Signal finit par accepter Bitcoin, l’app pourrait devenir un terrain de jeu pour des paiements privés de bout en bout à l’échelle grand public. L’idée, portée par la campagne « Bitcoin for Signal », est simple : brancher un module Cashu de type ecash pour permettre des micro-paiements en BTC directement dans les conversations.
Une campagne qui met la pression sur Signal
Le signal fort est venu de Jack Dorsey qui a publiquement invité Signal à « utiliser Bitcoin », tandis que des développeurs Bitcoin et des figures de l’écosystème relaient le message.
Pour une messagerie qui revendique des dizaines de millions d’utilisateurs actifs, l’enjeu est autant technique que culturel : faire cohabiter chiffrement des messages et monnaie numérique réellement utilisable.
Derrière le slogan, il y a une proposition concrète. Cashu, un protocole d’ecash inspiré de Chaum, permet d’émettre des « receipts » anonymes adossés à Bitcoin et de régler des montants sans exposer l’historique on-chain de l’utilisateur.
.@signalapp should use bitcoin. https://t.co/GLbteedwDk
— jack (@jack) October 16, 2025
En clair, la confidentialité des messages rencontrerait une couche monétaire qui se contente de soldes et de jetons aveugles. Le site de la campagne déroule le plaidoyer : paiements vraiment privés dans une app E2E, adoption plus large que les cryptos « spécialisées », et un alignement avec la mission de Signal.
À ce stade, rien d’officiel côté Signal, mais le timing n’est pas anodin. Le débat européen sur « Chat Control » a remis la vie privée au centre, et chaque alternative qui renforce l’autonomie des utilisateurs gagne en visibilité.
Cette poussée remet en cause le choix de 2021. Signal avait intégré MobileCoin pour des paiements en test, puis étendus, avec la promesse d’un cash numérique orienté mobile.
La promesse Cashu face aux objections privacy
Les partisans voient dans Cashu une passerelle pragmatique. Les critiques rappellent que Bitcoin n’intègre pas nativement de confidentialité forte, ce qui rend l’appariement avec une messagerie privée contre-intuitif.
Des ingénieurs privacy plaident pour Monero ou Zcash. La campagne répond que l’ecash masque les flux tout en gardant l’interopérabilité BTC, condition d’un usage massif.
Le débat ne se tranchera pas sur des slogans mais sur la mise à l’échelle. Peu de solutions privacy ont prouvé leur robustesse grand public.
C’est là que Signal, par son volume, peut faire pencher la balance si l’expérience est fluide et si les risques réglementaires restent contenus.
I'm one of the judges who gave this project a well-deserved first place at the @btcplusplus hackathon.
I've been wanting to try MobileCoin. But it's such a failure I can't even buy any.@signalapp needs to accept reality and just add Bitcoin support.
— Peter Todd (@peterktodd) October 16, 2025
La critique de MobileCoin réapparaît à chaque mention. Des développeurs estiment que l’empilement technique et la gouvernance de MOB cadrent mal avec les exigences de Signal.
D’autres pointent que Bitcoin n’est pas « magique » et que l’opsec comptera plus que la marque du jeton. On retrouve un clivage connu : mieux vaut une crypto très confidentielle mais de niche, ou une monnaie largement adoptée, rendue plus discrète par un protocole d’ecash et des garde-fous d’usage.
Le choix réel se fera sur l’intégration et la simplicité d’envoi dans l’interface, pas dans un fil de discussion.
Ce que cela changerait côté utilisateurs et régulateurs
Pour Signal, c’est une voie de financement communautaire plus directe, dans un moment où la pérennité des modèles non commerciaux est scrutée. Mais l’atterrissage devra éviter trois pièges.
D’abord, l’expérience d’achat initial de BTC, qui reste un point de friction. Ensuite, la gestion de la conformité locale, surtout en Europe où le projet « Chat Control » a été repoussé mais pas enterré.
Enfin, la sécurité opérationnelle des « mints » et des garde-fous anti-fraude, car une fonctionnalité de paiement attire mécaniquement arnaques et tentatives de phishing.
Côté régulateur, l’équation n’est pas simple. Les paiements in-app sur une messagerie chiffrée soulèvent des questions de traçabilité et de lutte contre les abus.
Si Signal avançait avec Cashu, le test serait grandeur nature : prouver qu’une architecture qui protège la conversation peut cohabiter avec une circulation de valeur raisonnablement confidentielle et compatible avec le droit.
Les positions se durcissent vite sur ces sujets. La pédagogie et des garde-fous visibles compteront autant que la cryptographie.
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