En Ouganda, le gouvernement pilote une monnaie numérique de banque centrale, version tokenisée du shilling, émise sur l’infrastructure permissionnée de Global Settlement Network et accessible depuis un smartphone.
Kampala teste un shilling numérique adossé à des obligations d’État
Particularité importante : le jeton est adossé à des obligations du Trésor ougandais, et le pilote respecte les garde-fous de conformité, du KYC à l’anti-blanchiment.
Le même programme s’inscrit dans une initiative plus vaste de tokenisation de 5,5 milliards de dollars d’actifs « réels », des hubs agro-industriels aux mines et aux fermes solaires. L’idée est classique mais ambitieuse : réduire la friction de financement, tracer les flux et attirer des capitaux en adossant l’innovation à des revenus locaux.
NEW: Uganda launches a #CBDC pilot as part of a $5.5B #tokenization initiative with Global Settlement Network and Diacente Group 🪙🌍 pic.twitter.com/SAlJZoEexm
— Coinpaper (@coinpapercom) October 9, 2025
L’Ouganda rejoint ainsi un club africain déjà actif, du Nigeria pionnier de la e-Naira à l’Afrique du Sud et au Ghana en phase d’essais, tandis que l’Égypte vise 2030 et que le Rwanda et le Kenya consultent encore.
Pour les utilisateurs, l’enjeu est pragmatique. Une CBDC mobile peut fluidifier les paiements publics et privés, stimuler la bancarisation numérique et, à terme, s’interfacer avec des rails transfrontaliers.
Pour l’État, l’adossement à la dette locale inscrit le projet dans un cadre budgétaire connu, tout en offrant un terrain d’essai aux cas d’usage de tokenisation.
Un corridor régional qui se structure
L’Afrique subsaharienne est l’un des bassins d’adoption crypto les plus dynamiques. Selon Chainalysis, la région a reçu environ 205 milliards de dollars de valeur on-chain entre juillet 2024 et juin 2025, avec un rôle central pour les stablecoins, qui pèseraient près de 43 pour cent des volumes.
Le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Ghana, le Kenya et la Zambie dominent, l’Ouganda figurant aussi dans le peloton de tête.
Dans ce contexte, voir le Kenya verrouiller un cadre pendant que l’Ouganda avance sur une CBDC et une stratégie de tokenisation crée un effet de corridor : rails réglementaires côté Nairobi, monnaie publique programmable côté Kampala.
Yesterday's @DailyMonitor 's cover story featured Uganda's plan for a CBDC. Ultimately, the need for military grade cybersecurity & regulatory clarity to protectct users' privacy were highlighted.
Attached below is a policy recommendation reminder arising from the CBDC proposal pic.twitter.com/3pa14lb27s— Marshall 🟧 (@DCF_Marshall) May 28, 2025
Les retombées potentielles sont donc concrètes. Les bourses et wallets conformes peuvent se brancher sur des flux de paiement formalisés, nouer des partenariats bancaires et capter la clientèle entreprise.
Une CBDC peut servir de collatéral ou de couche de règlement pour des produits de détail et des programmes publics. Et les projets de tokenisation d’infrastructures peuvent faire émerger une classe d’actifs locale, lisible par les investisseurs étrangers, tout en restant dans le droit national.
Questions ouvertes
Une blockchain peut-elle tenir la charge si les cas d’usage s’ouvrent au grand public, y compris en mode hors-ligne, avec des contraintes d’accès réseau en zone rurale ? La confidentialité des données de paiement devra être cadrée pour éviter des fuites.
L’adossement aux obligations d’État est lisible, mais il expose la CBDC à la perception du risque souverain.
Le vrai test sera l’exécution : délivrer des licences sans créer d’engorgement administratif, surveiller les pubs et les listings de tokens sans étouffer l’innovation, et coordonner Banque centrale et régulateur des marchés sans angles morts entre conservation, produits d’investissement et paiements.
Enfin, l’usage réel tranchera. En Afrique, l’adoption s’est souvent construite sur la valeur d’usage plus que sur l’effet d’annonce.
Les données de Statista projettent plus de 75 millions d’utilisateurs crypto d’ici 2026 et plus de 5 milliards de dollars de revenus sur le continent.
Pour convertir ces tendances en intégration durable, il faudra donc des applications simples côté grand public, des rails clairs pour les entreprises et des garde-fous compréhensibles pour les banques.
L’Ouganda pose des briques avec une CBDC adossée à des titres d’État et une stratégie de tokenisation. Le reste, comme toujours, dépendra donc de l’exécution, des coûts, et de la confiance que les utilisateurs placeront dans ces nouveaux rails.
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