L’Argentine envisage la fin de l’interdiction crypto pour les banques

Updated 2 heures ago by · 4 mins read

Longtemps hostile à l’intégration des cryptomonnaies dans le système bancaire, l’Argentine semble prête à changer de cap. La banque centrale étudie désormais un cadre qui permettrait aux banques d’offrir des services crypto sous surveillance renforcée.

Un virage réglementaire dans un pays sous pression monétaire

L’Argentine n’a jamais été un terrain neutre pour les cryptomonnaies. Marquée par des décennies d’inflation chronique, de contrôles de capitaux et de défiance envers le peso, la population s’est tournée très tôt vers le dollar puis vers les actifs numériques.

Jusqu’ici, la réponse des autorités avait surtout consisté à maintenir les banques à distance du marché crypto. Depuis 2023, les établissements financiers n’avaient tout simplement pas le droit d’offrir des services liés aux cryptomonnaies, qu’il s’agisse de conservation, de trading ou d’intermédiation.

La déclaration récente de la banque centrale argentine marque donc une rupture nette. L’institution envisage désormais de lever cette interdiction et de permettre aux banques d’opérer dans l’univers crypto, à condition de respecter un nouveau cadre réglementaire strict. Ce virage marque un changement de doctrine.

Les autorités ne cherchent plus à bloquer les usages, elles admettent désormais une réalité simple : les cryptomonnaies font déjà partie de l’économie du pays. L’objectif change, il ne s’agit plus d’empêcher l’adoption, mais de l’orienter et de la contenir.

Ce repositionnement arrive dans un contexte politique et économique bien précis. L’Argentine veut réédifier la crédibilité de son circuit financier tout en intégrant une population habituée à d’autres voies monétaires. Intégrer la crypto au système bancaire ne traduit donc aucun élan idéologique.

C’est un choix pragmatique, presque contraint, dicté par les usages plus que par les convictions. Encadrer ce qui existe déjà permettrait de mieux surveiller les flux, de renforcer la transparence et de réduire certains risques systémiques.

Des banques autorisées à entrer sur le marché crypto sous conditions strictes

Les normes KYC et AML resteraient bien au cœur des réflexions pour réduire les risques. Blanchiment, contournement des règles, abus financier. Rien de tout cela ne doit passer. Cette ligne traduit une chose : l’inquiétude des autorités ne disparaît pas.

Les cryptomonnaies sont tolérées tant qu’elles s’intègrent dans une architecture réglementaire contrôlable. En permettant aux banques de devenir des intermédiaires crypto, l’État reprend indirectement la main sur un marché jusqu’ici dominé par des plateformes locales ou étrangères moins faciles à superviser.

Les établissements bancaires disposent déjà d’outils de contrôle et de reporting que les autorités jugent indispensables.

Une telle évolution pourrait profondément modifier l’équilibre du marché crypto argentin. Les échanges locaux se heurtent à la concurrence nouvelle d’institutions susceptibles de proposer des frais moins élevés, une perception sécuritaire améliorable et une relation directe avec le système bancaire.

Bitcoin et stablecoins au cœur du dispositif envisagé

Si le projet aboutit, tous les actifs numériques ne seraient pas traités de la même manière. Les autorités argentines ciblent leurs efforts. Ces actifs sont déjà au cœur de l’économie informelle et semi-formelle, utilisés comme protection contre l’inflation et comme forme d’épargne alternative.

Bitcoin s’impose comme valeur refuge numérique pour une partie de la population. Les stablecoins adossés au dollar remplissent une fonction plus immédiate, celle de pallier l’instabilité de la monnaie locale. En les intégrant au périmètre bancaire, l’État ne cherche pas à supprimer ces usages, mais à les encadrer.

L’équilibre reste précaire. Trop de contraintes pousserait les utilisateurs vers des circuits non régulés. Mais trop de souplesse rendrait le contrôle illusoire. Et enfin, trop de laxisme exposerait le système financier à des risques qu’il ne maîtrise pas encore.

Ce choix révèle aussi une hiérarchisation implicite des cryptomonnaies. À terme, cela pourrait renforcer la domination de Bitcoin et des stablecoins dans un pays déjà très crypto compatible dans les usages quotidiens.

Pour l’écosystème crypto, l’effet reste ambigu, car cette évolution joue sur deux tableaux. Elle légitime les usages mais peut aussi ouvrir la porte à des capitaux plus institutionnels. Deux dynamiques qui avancent ensemble sans toujours aller dans la même direction.

De l’autre, elle réduit l’espace de liberté qui avait favorisé l’innovation et l’adoption rapide. Pour les banques, c’est l’opportunité de capter un marché déjà mature, mais aussi le risque d’exposer leurs bilans à une volatilité encore mal acceptée.


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