ASIC alerte : l’Australie risque de rater la vague de la tokenisation

L’Australie pourrait bien devenir le mauvais élève de la finance digitale. Lors d’un discours mémorable, le gendarme boursier australien, l’ASIC, a lancé un avertissement sans équivoque : le pays doit impérativement accélérer l’adoption des actifs tokenisés, ou se condamner à regarder le train de l’innovation passer. Voici pourquoi le pays est à la croisée des chemins.

Emmanuel Roux Par Emmanuel Roux Dernière mise à jour 3 mins de lecture
ASIC alerte : l’Australie risque de rater la vague de la tokenisation

Pour Résumer

  • Le président de l’ASIC, Joe Longo, avertit que l’Australie risque de devenir la « terre des occasions manquées » si elle ne s’adapte pas vite à la tokenisation.
  • Le régulateur relance son Innovation Hub et met à jour ses directives pour encadrer les actifs tokenisés et stablecoins.
  • Des initiatives comme le Project Acacia testent la tokenisation réelle d’actifs, pour replacer l’Australie sur la carte mondiale de la finance numérique.

Un sévère avertissement du régulateur

Lors d’un discours prononcé devant le National Press Club, Joe Longo, le président de l’ASIC, a employé des mots très forts. Il a déclaré que si l’Australie n’innovait pas rapidement, elle risquait de devenir la « terre des occasions manquées ».

Pourtant, l’Australie n’a pas toujours été en retard. Joe Longo lui-même a rappelé que le pays fut un pionnier avec son système de trading électronique, CHESS. De même, la première obligation tokenisée y est née en 2018, soit bien avant beaucoup d’autres pays.

ASIC AUSTRALIE

Mais aujourd’hui, ce leadership s’est évaporé. « D’autres pays nous dépassent », a-t-il constaté amèrement. En effet, des nations comme la Malaisie dévoilent déjà leur feuille de route ambitieuse.

Face à cette urgence, l’ASIC ne reste pas les bras croisés. Du coup, le régulateur a annoncé le grand retour de son « Innovation Hub ». Cette plateforme est cruciale, car elle aide les jeunes pousses de la fintech à se repérer dans le dédale des réglementations. Il modernisera le bac à sable réglementaire avec le gouvernement pour favoriser une innovation sécurisée.

Une course mondiale déjà lancée

La tokenisation, qui consiste à représenter des actifs réels (comme des actions ou de l’immobilier) sous forme de jetons numériques sur une blockchain, est en train de bouleverser la finance mondiale.

Rien que pour les obligations, le marché dépasse déjà les 35 milliards de dollars d’actifs tokenisés. Et les prévisions sont vertigineuses : le Boston Consulting Group estime même que ce marché pourrait atteindre 16 000 milliards de dollars d’ici à 2030.

Partout dans le monde, les géants de la finance se mobilisent. Par exemple, la banque américaine JPMorgan prévoit de tokeniser ses fonds du marché monétaire, qui pèsent environ 730 milliards de dollars, dans les deux prochaines années.

JPMorgan choisit Base pour son token JPMD

En parallèle, des institutions comme UBS et Apollo ont déjà tokenisé des milliards de dollars d’actifs. Même des gestionnaires d’actifs traditionnels comme Franklin Templeton lancent maintenant leur fond tokenisé à Hong Kong, prouvant l’adoption massive en cours.

En conséquence, l’Australie est en concurrence féroce pour attirer les capitaux. Joe Longo a confié qu’une récente rencontre avec le régulateur boursier américain (SEC) lui a fait prendre conscience de cette bataille acharnée. Chaque pays cherche à grignoter la plus grosse part possible du gâteau de la tokenisation, un marché en emergence rapide.

L’Australie passe (enfin) à l’action

Heureusement, le pays ne part pas de zéro. Récemment, l’ASIC a publié des directives mises à jour pour clarifier les règles du jeu. Ainsi, les stablecoins, les wrapped tokens et les jetons représentant des actifs réels sont officiellement considérés comme des produits financiers.

Bien entendu, comprendre de nouvelles règles prend du temps. C’est pourquoi l’ASIC a accordé une période de transition au secteur. Les entreprises ont jusqu’au 30 juin 2026 pour se mettre en conformité et obtenir leur licence de services financiers si nécessaire. Durant cette période, le régulateur adoptera une position de non-poursuite, sauf en cas de faute grave.

asic

Enfin, dans le cadre du « Project Acacia », la Banque centrale d’Australie (RBA) et d’autres institutions testent activement la tokenisation d’actifs en conditions réelles. Ce projet, qui bénéficie de dérogations réglementaires spéciales de l’ASIC, explore par exemple comment des jetons peuvent représenter des obligations ou des crédits carbone.

Ces tests sont cruciaux pour développer un nouveau standard industriel compétitif au niveau mondial, à l’image des travaux de Standard Chartered.


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Emmanuel Roux

Issu de la finance traditionnelle, j’ai naturellement basculé vers l’univers crypto, attiré par son potentiel. Je souhaite y apporter mon approche analytique et rationnelle, tout en conservant ma curiosité. En dehors de l’écran, je lis beaucoup (économie, essais, un peu de science-fiction) et je prends plaisir à bricoler. Le DIY, pour moi, c’est comme la crypto : comprendre, tester, construire soi-même.

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