Reprise de l’extraction de Bitcoin en Chine, en dépit de l’interdiction de 2021

L’extraction de Bitcoin reprend en Chine. L’activité, officiellement interdite depuis 2021, se reforme dans l’ombre. Elle revient parce que l’énergie est abondante. Elle revient aussi parce qu’elle est bon marché dans plusieurs provinces. Et elle revient, enfin, parce que les acteurs locaux savent profiter des marges de manœuvre régionales.

Emmanuel Roux Par Emmanuel Roux Dernière mise à jour 4 mins de lecture
Reprise de l’extraction de Bitcoin en Chine, en dépit de l’interdiction de 2021

Pour Résumer

  • Malgré l’interdiction de 2021, le minage de Bitcoin reprend discrètement en Chine.
  • Les mineurs profitent de l’énergie excédentaire et bon marché dans plusieurs provinces.
  • Cette reprise relance les acteurs locaux et modifie le hashrate mondial.

Un retour discret

Dans le Xinjiang, l’électricité s’accumule. Elle ne circule pas toujours hors de la province, les mineurs utilisent donc cette énergie bloquée. Ils branchent leurs machines et alimentent des centres de données qui tournent en continu, parfois dans des zones isolées.

La logique est simple : l’énergie reste sur place, alors on la convertit en puissance de calcul. Ce mouvement attire de nouveaux projets, notamment là où les coûts restent extrêmement faibles.

Les données récentes confirment cette reprise. La Chine aurait retrouvé environ 14% de la puissance de calcul mondiale du Bitcoin en octobre 2025. Le hashrate remonte discrètement : il se glisse dans les interstices du réseau national et renaît sous des formes dispersées.

L’augmentation n’est pas officielle, mais elle est visible. Elle se lit dans les chiffres du secteur, dans les importations de matériel et dans les ventes des fabricants.

Canaan bénéficie particulièrement de cette dynamique. L’entreprise, spécialisée dans les machines ASIC, enregistre une poussée inattendue de ses ventes en Chine. Son chiffre d’affaires se recentre sur le marché domestique, avec une progression spectaculaire depuis 2022. En effet, plus de la moitié de son chiffre d’affaires trimestriel serait désormais généré dans le pays.

Cette croissance reflète un phénomène plus large : même interdite, l’activité ne disparaît pas. Elle se réorganise, elle s’adapte et exploite les failles.

Les autorités locales jouent un rôle ambigu. Bien que l’interdiction reste en place, certaines provinces bénéficieraient d’une répression moins systématique. Les autorités ferment les yeux quand les bénéfices économiques deviennent importants.

En effet, elles tolèrent l’activité lorsque celle-ci absorbe de l’énergie excédentaire ou dynamise des infrastructures sous-utilisées. Finalement, il s’agit d’un équilibre fragile entre réglementation centrale et intérêts régionaux.

Le Sichuan illustre bien ce paradoxe. Pendant la saison des pluies, l’hydroélectricité déborde. Les mineurs s’installent donc près des barrages et utilisent l’excédent. Ils déplacent parfois leurs machines selon les cycles hydrologiques, comme on suit une ressource mobile.

Ce nomadisme technologique les rend difficiles à repérer. Il crée un paysage fragmenté où les petites opérations se fondent dans les marges du réseau énergétique.

Un écosystème mondial chamboulé

Ce retour s’inscrit dans une histoire plus longue. Avant 2021, la Chine dominait presque entièrement l’industrie du minage. Les coûts étaient bas et les infrastructures étaient déjà robustes.

L’interdiction avait brusquement arrêté cette dynamique, mais elle n’avait pas effacé les compétences, les machines et les réseaux d’acteurs. Tout cela existe encore. Et tout cela facilite aujourd’hui la reprise.

Sur le plan international, cette résurgence inquiète. Elle renforce la position d’un acteur dont on pensait qu’il avait quitté la scène. Elle ravive également des débats sur la sécurité et sur la concentration du hashrate.

La reprise interroge aussi sur la transparence énergétique : que signifie un réseau décentralisé lorsque l’un des grands pays producteurs d’énergie recommence à miner en silence ?

Pour l’écosystème Bitcoin, le signal est double. Le retour de la Chine montre que l’activité résiste aux interdictions. Il montre aussi que Bitcoin attire lorsqu’une opportunité économique s’ouvre.

Mais il rappelle, en même temps, que l’équilibre du réseau dépend de décisions politiques mouvantes et parfois inattendues.

À long terme, certains observateurs imaginent une évolution. Peut-être que Pékin assouplira sa position. Peut-être aussi que l’économie, en ralentissement, poussera les autorités à reconsidérer le secteur.

Rien n’est officiel. Pourtant, les signaux souterrains indiquent qu’un changement progressif n’est pas impossible.

La résurgence du minage en Chine révèle ainsi une réalité : l’interdiction ralentit, mais ne supprime pas. L’énergie bon marché attire et l’économie locale s’adapte. C’est cette réalité, discrète mais puissante, qui redessine aujourd’hui la carte mondiale du Bitcoin.


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Emmanuel Roux

Issu de la finance traditionnelle, j’ai naturellement basculé vers l’univers crypto, attiré par son potentiel. Je souhaite y apporter mon approche analytique et rationnelle, tout en conservant ma curiosité. En dehors de l’écran, je lis beaucoup (économie, essais, un peu de science-fiction) et je prends plaisir à bricoler. Le DIY, pour moi, c’est comme la crypto : comprendre, tester, construire soi-même.

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