La BCE ne parle plus « d’exploration » mais de calendrier : objectif 2029 pour un euro numérique utilisable par tout le monde dans la zone euro. Condition indispensable : que le Parlement européen et les États bouclent le cadre légal d’ici 2026.
Par Emmanuel RouxDernière mise à jour
4 mins de lecture
Pour Résumer
La BCE vise 2029 pour lancer l’euro numérique, à condition que la loi soit votée d’ici 2026.
Les banques freinent, craignant la fuite des dépôts, tandis que les élus exigent plus de confidentialité.
Si le compromis tient, l’euro digital deviendra le premier moyen de paiement public européen.
Un calendrier qui part du droit, pas de la technique
La phase de préparation ouverte en novembre 2023 se termine, mais la BCE va la prolonger parce qu’elle ne peut pas lancer un euro numérique sans base légale européenne. Le schéma interne est le suivant : texte adopté en 2026, phase de construction en 2026-2028, lancement en 2029.
Si le Parlement se divise encore sur la vie privée ou sur le rôle des banques, tout glisse. C’est pour ça que la BCE insiste autant devant les élus : sans loi, pas de monnaie digitale publique.
The digital euro would be a digital form of cash: simple, free, inclusive, protecting privacy and accepted throughout the euro area, Executive Board member Piero Cipollone explains in an interview with @Delo.
Dans ce modèle, l’euro numérique ne remplace pas le cash, il le double : même créancier (la banque centrale), mais forme électronique utilisable en ligne comme hors ligne.
C’est aussi une réponse au fait que les paiements européens reposent beaucoup trop sur des acteurs non-européens et sur des stablecoins en dollar.
Des résistances bien réelles côté banques et États
Pourquoi tout le monde ne signe pas tout de suite ? Parce que les banques commerciales regardent le projet en se demandant si les dépôts ne vont pas se déplacer vers un wallet garanti BCE.
Elles poussent donc pour des plafonds de détention faibles et pour que la distribution passe par elles. De l’autre côté, plusieurs États et députés veulent des garanties de confidentialité : ils ne veulent pas se faire accuser d’avoir créé une monnaie « traçable par défaut ».
C’est ce bras de fer qui explique les retards depuis 2023. La BCE, elle, vend le projet comme un filet de sécurité : même en cas d’attaque cyber ou de guerre, chaque Européen aurait un moyen gratuit et accepté partout de payer en euro public.
Piero Cipollone le répète : l’objectif est que « tous les Européens » aient accès à un moyen de paiement numérique souverain, pas que la BCE se transforme en néobanque. Mais cette promesse devra être écrite noir sur blanc dans le règlement, sinon les opposants reviendront à la charge en 2026.
Le reste du monde n’est pas si en avance
Autre élément qu’on oublie souvent : malgré tout le bruit autour des CBDC, il n’y a toujours que trois pays réellement en production grand public, à savoir le Nigeria, les Bahamas et la Jamaïque. Tout le reste du monde est en pilote, parfois depuis des années.
C’est ce que rappelle le CBDC Tracker, qui compte désormais près de 50 pilotes mais très peu de déploiements massifs. L’UE n’est donc pas « en retard », elle avance surtout plus prudemment parce qu’elle doit faire s’assurer d’être opérationnelle pour plus de 20 pays.
🔍 Atlantic Council | New CBDC Tracker Update – July 2025 🔍
The @@AtlanticCouncil has released a major update to its flagship CBDC Tracker.
Key highlights since our last update in September 2024:
📊 137 countries are exploring a CBDC (98% of global GDP) 🚀 72 countries are in… pic.twitter.com/MHqToz03US
— Digital Pound Foundation (@digitalpoundfdn) July 3, 2025
Ce point est important dans le discours politique : si l’Europe lance un euro numérique sans adoption, elle se fera attaquer sur le coût et sur la surveillance. Si elle ne lance rien, elle laissera le terrain aux stablecoins en dollar et aux rails de paiement américains.
La vraie bataille sera sur la confidentialité
C’est là-dessus que se jouera 2026. La BCE promet déjà un mode « faible montant » avec plus d’anonymat, et un mode « montant plus élevé » avec KYC et contrôles.
Des fondations comme la Human Rights Foundation insistent de leur côté sur le fait qu’une CBDC mal conçue peut devenir un outil de corruption ou d’exclusion, pas seulement un progrès d’inclusion financière.
Les eurodéputés vont donc exiger que l’aspect confidentialité soit dans le texte, pas seulement dans la communication.
Si tout s’aligne comme le souhaitent Francfort et Bruxelles, 2029 devient crédible : cadre adopté vers 2026, expérimentation élargie en 2026-2027, choix des prestataires, puis déploiement progressif dans les apps bancaires existantes et dans une app EU.
Mais si le Parlement se crispe sur la surveillance, on peut très bien se retrouver avec une version minimaliste ou repoussée.
Issu de la finance traditionnelle, j’ai naturellement basculé vers l’univers crypto, attiré par son potentiel. Je souhaite y apporter mon approche analytique et rationnelle, tout en conservant ma curiosité.
En dehors de l’écran, je lis beaucoup (économie, essais, un peu de science-fiction) et je prends plaisir à bricoler. Le DIY, pour moi, c’est comme la crypto : comprendre, tester, construire soi-même.
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